Non-fiction & Poésie
1ère de couverture de Mon cœur mis à nu
14 déc. 2021

Mon cœur mis à nu

Informations
Rendre visible l'invisible, Immortaliser des émotions, Capturer des souvenirs ; Voilà le pouvoir des mots, et je l'espère le pouvoir de mon livre. Mon cœur mis à nu, c'est une autobiographie avec des interludes poétiques. A travers ce livre, j'ai choisi de dire l'indicible, pour réparer ce qui me semblait autrefois irréparable. Mon cœur mis à nu, c'est de la sincérité, des douleurs rarement énoncées, des joies à partager. C'est un voyage au cœur du handicap et de l'amour. C'est une invitation à la tolérance, un hymne à la vie.
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La chronique de Ellexa HeartsBooks
Le récit de la résilience
La naissance de Laura est le point de départ de son histoire, mais, c'est aussi l'évènement qui va précipiter son existence de toute petite fille dans un cauchemar d'abord médical, puis qui frappe sa vie pour toujours : elle est née sans tibias, et en lieu et place de petite enfance, elle passe de lits d'hôpitaux en lits d'hôpitaux jusqu'à une amputation bilatérale, alors même qu'elle est à peine une enfant. Laura n'est cependant pas très douée pour rester en arrière, immobilisée, moquée ou pointée du doigt, et elle avale les moments de vie avec une vraie faim d'expériences, de rencontres et de beauté. La façon dont le roman est construit tient du journal, quoique pas tout à fait, et l'adresse se confond avec une qui le serait au lecteur, directement, en lui demandant de réfléchir, de se positionner, d'examiner ses propres biais et ses propres préjugés. De ce fait, on accroche tout de suite à ce contenu, c'est comme si Laura nous prenait doucement mais fermement la main pour nous emmener dans une forme d'album photo de ses plus beaux souvenirs, et, aussi, des pires. Il y a dans le style de l'autrice quelque chose de désarmant. Elle ne triche pas, elle n'essaie pas d'arrondir les douleurs ou les moments de fatigue, de désespoir, même, et elle n'a pas vraiment pour but de nous les épargner non plus. Cependant, ce n'est pas gratuit. Partout, tout le temps, elle s'attèle à montrer par l'exemple toutes les vérités qui volent autour du handicap pur et dur, qu'elles soient liées à la façon dont le monde perçoit la différence, aux absurdités administratives, à la façon dont rien n'est vraiment adapté à leurs besoins, ou, aussi, à la beauté abrutissante de la rencontre avec des semblables qui comprennent en un quart de seconde exactement ce qu'elle ressent. C'est tout cela que Laura essaie-avec succès-de communiquer, sans jamais se placer comme donneuse de leçon. On a envie de devenir son amie, pas par pitié, mais parce qu'elle inspire le respect et qu'elle semble attirer la lumière. Les inter-chapitres donnent un vrai rythme. Dans une forme poétique en strophes avec rimes, ils reprennent le coeur du chapitre en exploitant les émotions dans un état presque encore plus brut. Peut-être est-ce une comparaison non désirée, mais on pourrait presque rêver Grand Corps Malade les clamer et les mettre en musique tant ils sont précis et porteurs d'un vrai message. Les thèmes abordés au fil de la vie de la jeune femme sont ceux qu'on attend de quelqu'un qui raconte son existence : l'enfance, les amis, l'école, les parents...Mais ils sont tous vus au travers du prisme du handicap et deviennent, eux aussi, différents. L'enfance devient terrain de rejet, mais aussi de rires. Les amis deviennent des piliers et des facteurs d'acceptation de soi. L'école devient un endroit qui propulse la différence par son inaptitude à être inclusive, mais qui permet aussi des moments d'épiphanies pures et de découvertes culturelles. Les parents deviennent des modèles de force et des faiseurs de racines. Tout est pareil, et tout est différent, que pour un enfant qui serait né avec deux jambes parfaitement fonctionnelles. Laura crée des parallèles entre les rites de passages classiques de tout enfant né de ce côté du siècle, et elle y ajoute les hauts et les bas incessants inhérents à sa condition. Ce récit est, toutefois, beaucoup plus qu'un simple compte rendu de sa vie. C'est nettement plus riche que "Laura : de la naissance à la vie adulte", parce qu'elle n'a pas un parcours atypique dans la différence. Elle rencontre très vite la liberté des corps immergés, et se prend de passion pour la natation. En ce sens, c'est autant une chronique d'une athlète de haut niveau que c'est celle d'une athlète handisport. D'ailleurs, l'handisport ne se présente pas tout de suite, la forçant à se confronter aux autres, ceux qui ont tous leurs membres. C'est un passage poignant-dans un roman bouleversant-qui la pousse encore plus loin dans ses retranchements, avant que l'handisport ne viennent illuminer sa vie. Ce passage charnière est représentatif de tout le roman, et démontre que quand on se bat pour que les choses de la vie quotidienne-étudier, faire du sport, avoir des loisirs-soient vraiment accessibles, elles sont plus que juste accessibles. Elles sont génératrices de lien social, d'inclusion, elles compensent un peu pour le manque de chance que Laura a eu à la naissance. Et c'est un des enseignements les plus forts du roman : tous les efforts de la société telle qu'elle existe aujourd'hui ne suffisent pas, pas même un peu, à égaliser les chances. Sans aucune véhémence, sans rage, sans colère-même si une forme de colère se sent dans le récit, mais plutôt une colère contre ce qui l'a privée de ses jambes sans designer de responsable-Laura Mahieu nous pousse à l'action, à faire de nous un peu plus que de simple lecteurs, en nous transformant en lecteurs avertis. En nous apprenant que la prochaine fois qu'une personne en fauteuil roulant croise notre chemin, ce n'est pas digne de regards gênés. En nous montrant que le handisport est au moins aussi fascinant et digne de médiatisation que le sport classique. Dans cet ensemble épatant, il subsiste un petit regret : quand l'autrice évoque les immenses bonheurs des rencontres avec les gens qui l'ont inspirée, ou même ses amis les plus proches, on en veut un peu plus. J'aurai aimé que Laura débride un petit peu plus ses émotions et ses souvenirs pour colorer ces instants au delà de quelques lignes. Par exemple, la rencontre avec Philippe Croizon est probablement un pivot dans sa vie, il lui apprend à rire d'elle, il la regonfle de joie et de confiance, et ne limiter ce moment qu'à quelques lignes est frustrant, tant on sent toute la beauté derrière. Pudeur d'autrice ? Peut-être. C'est cependant bien la seule remarque à faire sur ce roman, tant il est vibrant, poignant, dévastateur et plein de vie. Pour finir, il faut mettre ce récit entre toutes les mains, ne fut-ce que pour faire comprendre l'urgence de l'accessibilité partout, y compris là où elle ne fait pas de bruit-comme un ascenseur de bâtiment de faculté-et pour faire passer le message si simple de la beauté de la différence, même dans ses injustices et ses batailles perdues d'avance.

⭐ Les notes en détail

Atmosphère

9/10

Le choix de l'autrice de présenter son histoire comme un journal intime tout en ne suivant pas la forme classique du "cher journal" permet une forme d'adresse vers le lecteur, qui de ce fait est interrogé dans ses biais, ses préconceptions, ses préjugés. En ce sens, on a l'impression que Laura nous emmène nous promener dans ses souvenirs, qu'elle présente sans faux-semblants.

Style d'écriture

8/10

Laura a une façon très fluide de s'adresser au lecteur, sur le mode du journal intime. Les phrases sont directes, nettes, franches, rapides, les chapitres sont courts, et tout donne une impression de rythme effréné. C'est à la fois parfaitement logique étant donné la vie de Laura, mais cela peut générer une pointe de frustration. Certains moments charnières méritaient peut-être plus de mise en abîme, de les partager en profondeur. Les inter-chapitres poétiques sont très prenants.

Immersion

9/10

On plonge très vite dans le récit, par la volonté nette de Laura de ne rien noue épargner dans le bon comme dans le moins bon. L'adresse personnelle à son journal se ressent comme une adresse au lecteur, et elle nous pousse à nous questionner au fur et à mesure qu'on prend conscience des difficultés primaires, secondaires, annexes et structurelles. Elle prend le lecteur par la main pour lui faire visiter ses souvenirs, ses combats, ses victoires et ses défaits, et ne la lâche qu'au mot "fin".

Plaisir

9/10

J'ai beaucoup aimé connaître la vie de ce bout de femme qui déborde de force, et de ce récit de la résilience comme seconde nature. L'histoire de Laura est nécessaire, parce qu'elle met parfaitement en relief les millions de toutes petites choses que nous vivons tous les jours en tant que "valides" et qui rendent celles des handicapés proprement infernales. J'y ai aimé le message, j'y ai aimé la franchise, j'y ai aimé la puissance qui s'en dégage.

Note finale

4.50
Publié le 10 octobre 2023

Évaluation de la chronique par l'auteur

👍 Positif